Christian REDON-SARRAZY, Sénateur de la Haute-Vienne

Quand le Gouvernement mènera-t-il enfin une politique agricole ambitieuse ?

Au cours de la séance publique des questions d’actualité au Gouvernement et à l’occasion du Salon international de l’agriculture, j’ai interrogé le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire sur la politique agricole conduite par son Gouvernement.

La situation des agriculteurs et de l’agriculture continue en effet de se dégrader depuis 2017, avec une profonde crise des vocations, un taux de suicide tristement élevé et des problèmes persistants de transmission des exploitations. Et les perspectives sont sombres, tant les crises pointent à l’horizon, à commencer par la sécheresse. Pour autant, l’Exécutif manque encore et toujours d’ambition… 

Car nous devrions davantage défendre notre modèle agricole français, un modèle durable, familial et respectueux de l’humain, de l’animal et du sol. Nous devrions davantage promouvoir un modèle qui privilégie la polyculture-élevage, les circuits courts et les chaînes d’approvisionnement alimentaire sûres. Nous devrions davantage soutenir un modèle qui refuse la concurrence déloyale causée par les accords de l’UE avec le Mercosur, le Canada et la Nouvelle-Zélande. N’oublions pas que ce qui est en jeu, c’est rien de moins que notre souveraineté et notre sécurité alimentaire, autrement dit notre indépendance nationale !

Dans sa réponse, le porte-parole du Gouvernement a reconnu partager ces éléments de constat et de diagnostic. Mais il n’en a tiré aucune conséquence, se contentant d’égrener le chapelet des textes de loi adoptés ces dernières années et qui ont déjà fait la preuve de leur insuffisance pour améliorer la situation…

Vous trouverez ci-dessous le texte de ma question au Gouvernement.

Monsieur le Ministre,

Hier puissance agricole et deuxième exportatrice mondiale de produits agroalimentaires, la France est passée au cinquième rang en 20 ans.

Ses importations ont suivi le sens inverse et représentent aujourd’hui près de la moitié des produits consommés par les Français chaque jour.

La France n’est plus le grenier de l’Europe : elle est déficitaire en matière alimentaire depuis 2015. Le nombre d’exploitations ne cesse de diminuer, tout comme les cheptels et l’on observe un taux inquiétant de « déconversions » dans l’agriculture biologique.

Après cinq ans et demi d’action gouvernementale, la situation des agriculteurs ne s’est pas améliorée, loin de là :

  • le taux de suicide chez les exploitants agricoles est le plus élevé de toutes les catégories socio-professionnelles ;
  • la transmission des exploitations reste un problème majeur : en 25 ans, le prix des terres agricoles aura doublé, et dans dix ans, 50% des chefs d’exploitation seront en droit de partir à la retraite.

La profonde crise des vocations s’explique avant tout par l’absence d’un revenu décent et par le coût de plus en plus élevé du foncier agricole.

La proposition de loi pour lutter contre l’accaparement du foncier agricole, déposée par votre majorité juste avant les élections présidentielles de 2022, n’a répondu en rien à la problématique de concentration du foncier et des outils de production.

A l’heure actuelle, l’Etat démontre un manque total d’ambition.

Or, les crises se succèdent et vont se multiplier très rapidement. L’été 2022 a montré à quel point notre agriculture était fragile. La France est déjà depuis un mois en situation de sécheresse.

Le véritable modèle agricole français que nous défendons doit être pérenne, familial, respectueux des humains, des animaux et des sols, et c’est celui qu’il faut préserver à tout prix. Nos territoires et nos concitoyens ont besoin de la polyculture-élevage, de la multiplication des circuits courts, de relocalisations avec des chaînes d’approvisionnement alimentaire sûres, non soumises aux aléas climatiques et géopolitiques. Préserver notre souveraineté et notre sécurité alimentaire est un gage d’indépendance et de survie. A cet égard, les intentions de l’Etat quant à la ratification des accords UE-Mercosur, du CETA, l’accord de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande, autant de portes ouvertes à une concurrence déloyale, ne sont toujours pas claires.

Monsieur le Ministre, nous avons besoin d’une trajectoire d’adaptation précise et cohérente face à tous ces enjeux, et le temps presse ! Quand allez-vous proposer une véritable politique agricole ?

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