Christian REDON-SARRAZY, Sénateur de la Haute-Vienne

🏛 Discussion générale – Proposition de loi Certification de la cybersécurité des plateformes numériques

Ce lundi 24 février 2022, nous avons examiné en deuxième lecture la proposition de loi visant à mettre en place une certification de la cybersécurité des plateformes numériques. J’ai porté et défendu devant la haute chambre la position du groupe socialiste sur ce texte :

« Au cours des dernières années, plusieurs affaires ont éclaboussé le monde de l’industrie numérique, avec d’importants faits de fuites et d’exploitation de données personnelles. Qu’elles appartiennent à des particuliers ou à des entreprises, les données stockées dans le cyberespace ont été la proie d’attaques qui se sont multipliées à un rythme quasi exponentiel au cours des dernières années, tandis que les solutions numériques proposées sont de plus en plus complexes, en raison d’algorithmes toujours plus puissants et toujours plus opaques.

Les acteurs de ce marché développent de nouveaux usages, fondés sur l’analyse de nos données personnelles, données qu’ils accumulent de plus en plus grâce au nombre croissant d’objets connectés présents autour de nous, parce que leur modèle économique repose sur elles ; on parle d’ailleurs maintenant de data lakes – lacs de données – et non plus de simples bases de données comme naguère.

La crise sanitaire que nous subissons et dont nous peinons à sortir a amplifié ce phénomène. En raison des confinements répétés que nous avons traversés, la dématérialisation de notre société a été accentuée, accélérée, alors que, dans le même temps, la relation de confiance entre les citoyens internautes et les géants de cette industrie s’est dégradée, sans que cela remette en cause l’hégémonie de ces acteurs.

En 2018, l’adoption du RGPD a contraint plateformes et éditeurs de services numériques à aller dans la bonne direction ; ce texte représente sans conteste une avancée majeure. Toutefois, il n’atteint pas tous ses objectifs et il présente des failles manifestes.

Les experts de ce domaine que j’ai entendus dans le cadre de mes travaux à la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) ont exprimé leurs inquiétudes, en confirmant que cette situation était amenée à se dégrader dans les années à venir. Les cybercriminels se sont professionnalisés et industrialisés, et leur champ d’action s’est mondialisé. Leurs facultés de nuire se sont développées bien plus rapidement que la capacité de leurs victimes à se protéger.

Malheureusement, les événements tragiques qui se déroulent à l’Est, auxquels de nombreux collègues ont déjà fait référence – je m’associe d’ailleurs à ces derniers pour condamner ces attaques et exprimer mon soutien au peuple ukrainien –, nous montrent que les cyberattaques sont soit le préalable soit le complément à la déstabilisation d’un gouvernement.

Dans son avis du 29 avril 2021, la CSNP avait recommandé aux pouvoirs publics de développer une politique massive d’information et de sensibilisation de la population aux risques encourus dans l’espace numérique, à titre tant privé que professionnel, et de prendre les mesures et dispositions permettant de s’en prémunir.

Ces alertes rejoignent celles qui figuraient dans le rapport de la commission d’enquête sur la souveraineté numérique, présidée par notre collègue du groupe socialiste Franck Montaugé : « Dans un univers numérique marqué par une forte asymétrie entre, d’un côté, ceux qui contrôlent données et algorithmes et, de l’autre, ceux qui utilisent les plateformes, imposer le respect de ces droits et les rendre effectifs pour les particuliers reste encore concrètement à accomplir. »

Je me réjouis donc de voir le législateur se saisir de ce sujet. Nous devons être à la hauteur des enjeux que recouvre la question de la cybersécurité. La garantie de la protection de la vie privée de nos concitoyens est une des garanties clés de notre démocratie.

La mise en place d’un Cyber-score va dans le bon sens, sous réserve que l’État s’en saisisse pour sensibiliser massivement la population à ce sujet.

Veillons à ce que le développement et l’essor du numérique soient toujours synonymes de l’émancipation des femmes et des hommes et non de leur aliénation. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera cette proposition de loi, car il partage l’état d’esprit de ses auteurs. Même si elle reste limitée, elle représente un premier pas dans la prise de conscience de l’importance de nos données numériques. »

 

Retrouvez cette intervention en vidéo :

Articles récents