Christian REDON-SARRAZY, Sénateur de la Haute-Vienne

Nous avons besoin des collectivités territoriales !

Cette semaine se tient le Congrès des Maires à Paris, l’occasion de recevoir les élus locaux au Sénat mais aussi de rappeler leur rôle quotidien indispensable au plus près de nos concitoyens.

Depuis 2017, la relation entre l’Etat et les maires est particulièrement difficile. La gouvernance d’Emmanuel Macron n’y est pas étrangère. Jamais élu lui-même, le Président de la République n’a eu de cesse de réduire les marges de manoeuvre, techniques et financières, des collectivités locales, tout en leur confiant de plus en plus de missions.

Les sénateurs socialistes ont ainsi tenu à rappeler certains faits et leurs propres propositions en cette semaine particulière, par l’entremise d’une tribune collective parue dans le Huffington Post, dont vous pouvez retrouver le texte ci-dessous.

« Face à l’urgence sociale et climatique, le pays a besoin de davantage de collectivités territoriales !

C’est peu de dire que les enjeux de la décentralisation n’ont jamais été au cœur de la pensée politique et des projets de l’actuel président de la République. Sans aucune expérience d’élu local, quand il ne cachait pas son désintérêt pour nos collectivités, il s’est surtout illustré par la volonté d’exercer un contrôle toujours plus resserré sur celles-ci.

Après un quinquennat et demi d’inaction, il engage une énième mission en sollicitant Éric Woerth pour réfléchir en particulier à la rationalisation de l’action des collectivités… sous-entendu : envisager la suppression d’un niveau de collectivités. La technostructure ne renonce jamais alors même que l’organisation territoriale à trois niveaux de la France est plutôt conforme à ce que l’on retrouve dans les grands pays européens. 

Nous, Sénateurs socialistes, écologistes et républicains, considérons qu’il s’agit d’une faute politique, qui s’inscrit à contre-sens de l’histoire. Alors qu’une part écrasante de l’investissement local est portée par nos collectivités territoriales, que l’innovation au cœur de nos territoires dépend directement d’elles, que la crise sanitaire a démontré, si besoin en était, la place capitale qui est la leur pour mettre en œuvre la solidarité nationale, ce discours de défiance est à la fois injuste et révoltant.

Rationnaliser les collectivités : une faute politique

Contrats de Cahors, tentative avortée de contraindre les collectivités via des pactes qui n’avaient de « confiance » que le nom, amenuisement minutieux – année après année – des leviers fiscaux à disposition des collectivités : il faut sortir de cette logique mortifère. Alors que les dangereux ballons d’essai se multiplient, nous continuerons à défendre pied-à-pied le principe de libre-administration de nos collectivités, qu’il se rapporte aux compétences, aux financements ou au contrôle de l’État.

C’est dans cet état d’esprit que nous avons décidé de poursuivre trois grands chantiers.

En premier lieu, à l’occasion du budget de fin de gestion pour 2023, nous porterons la prise en charge par l’État des avances au « filet de sécurité », versées à tort aux collectivités sur l’insistance d’un gouvernement qui voyait là un simple objet de communication. Ce remboursement serait, pour elles, une difficulté réelle. Nous nous opposons à ce qu’un dispositif d’aide financière se transforme en épée de Damoclès pour les finances locales.

Ensuite, à l’occasion du projet de loi de finances pour 2024, nous défendrons l’indexation des dotations sur l’inflation et nous nous opposerons à toute nouvelle remise en cause de l’autonomie fiscale des collectivités. Nous rappellerons la nécessité d’instituer une véritable loi de financement des collectivités territoriales pour leur assurer stabilité et visibilité.

Enfin, alors que le président de la République a souhaité, à raison, faire de la planification écologique une priorité de son second quinquennat, force est de constater que la méthode pose question. Nous prônons une démarche centrée sur l’action des collectivités territoriales, en amont et de façon concertée, dans chacun de nos territoires et non un fléchage autoritaire et contre-productif d’une partie des dotations allouées aux collectivités vers les sujets de transition écologique. Cela nécessite de repenser leurs modes de financement mais aussi de mieux associer les élus et les populations dans les choix politiques et structurants qui engagent l’avenir de leur territoire. C’est ainsi que la France relèvera le défi de la transition environnementale malgré les multiples crises, notamment énergétiques, quitouchent les collectivités.

Les élus locaux sont en première ligne pour assurer la cohésion de notre pays

C’est ce que proposent les Sénateurs socialistes, écologistes et républicains par le biais d’un financement suffisant et pérenne, affecté à cet enjeu. Le principe du pollueur-payeur doit mieux être appliqué en France. Il permettra de lever les moyens financiers nécessaires à la transition environnementale. Ces montants doivent être largement affectés aux territoires, pour leur permettre de piloter les transformations nécessaires tant en matière de production que de transports, d’aménagement des espaces.

Certains répondront que le lancement des COP régionales par la Première ministre en septembre dernier répond à cet objectif.

Comment considérer sérieusement qu’une annonce si soudaine et assortie d’un calendrier extrêmement contraint, puisse se traduire par la volonté de l’Exécutif d’aboutir à un plan d’action dès l’été 2024, qui décline – excusez du peu – la mise en place de feuilles de route régionales jusqu’en 2030 ?

La majorité présidentielle remet en cause la place des collectivités. Nous, Sénateurs socialistes, écologistes et républicains, pensons que cette dernière doit être renforcée

Comment ne pas imaginer que, derrière ce calendrier intenable, se cache la volonté du Gouvernement de se désengager d’une partie de la mise en œuvre de la planification écologique en renvoyant la responsabilité aux régions de proposer leurs propres feuilles de route ? À terme, cela pourrait engendrer des distorsions entre territoires sans, évidemment, proposer de financement crédible. 

En définitive, alors que la majorité présidentielle remet en cause la place des collectivités, nous, Sénateurs socialistes, écologistes et républicains, pensons que cette dernière doit être renforcée et que l’action des élus locaux doit être soutenue. Nous savons que ce sont eux qui sont en première ligne pour assurer la cohésion territoriale et sociale de notre pays, pour organiser la démocratie locale et pour préparer un avenir meilleur, soutenable pour nos concitoyennes et nos concitoyens.

Face aux défis de notre époque, nous avons besoin de plus de collectivités territoriales !

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