Jeudi 24 novembre, avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER), j’ai voté contre l’adoption de la 1ère partie du projet de loi de finances pour 2023 consacrée aux recettes de l’État et des collectivités territoriales.
Dans un contexte de crises multiples dont les conséquences impactent tout particulièrement les Français les plus modestes, aux prises avec l’inflation des prix (notamment l’alimentation et l’énergie), la montée de la précarité et l’explosion de la pauvreté, nous nous sommes opposés au déni de justice d’un Gouvernement qui continue sa fuite en avant fiscale et sociale, avec une politique inéquitable, favorable aux « déjà favorisés » et défavorable aux « déjà défavorisés ».
Certes, nous avons obtenu des avancées significatives pour les collectivités territoriales. Et nous leur avons épargné la cure d’austérité initialement projetée par un Gouvernement, qui les considère comme une variable d’ajustement des comptes publics alors qu’elles sont, elles aussi, mises en difficulté par les crises. Nous avons notamment arraché le rejet de la suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), laquelle menacerait le fonctionnement de nos collectivités et les finances publiques de l’Etat. Nous avons décroché l’indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation pour 2023 (et son renforcement pour l’exercice des mandats locaux), une mesure essentielle pour permettre aux collectivités d’assurer leurs missions de service public. Nous avons aussi emporté la baisse du taux de TVA sur les transports publics à 5,5 %, l’exonération de malus écologique et de taxe sur la masse en ordre de marche de l’ensemble des véhicules des services départementaux d’incendie et de secours, l’extension du crédit d’impôt pour frais de garde des enfants jusqu’à 12 ans, et la prorogation du prêt à taux zéro pour les primo-accédants. Nous avons enfin obtenu de donner aux élus locaux les moyens de soutenir les jeunes ménages souhaitant construire leur projet de vie au cœur des villes et des villages, de soutenir les familles modestes dans leur projet d’accession à la propriété, ou encore l’encouragement de la cohabitation intergénérationnelle.
Mais le premier budget du second quinquennat de M. MACRON n’en mettait pas moins en musique la volonté de l’Exécutif de mener une politique injuste qui bénéficie aux entreprises et aux particuliers les plus aisés, aux dépens des plus modestes. En diminuant les impôts de production, en refusant de taxer les superprofits et les superdividendes à la différence de la majorité de nos voisins européens, en refusant d’imposer les transactions financières, en refusant de rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), le Gouvernement a choisi de se priver de leviers fiscaux pour agir et de contraindre l’État, en conséquence, à réaliser des coupes claires dans les crédits budgétaires de politiques publiques pourtant prioritaires, par exemple pour financer les services publics ou la transition écologique. Pour résumer, moins d’impôts = plus d’injustices.
Le Gouvernement a rejeté de nombreuses propositions utiles défendues par les Sénateurs du groupe SER, pour une fiscalité d’accès à la propriété plus équitable, pour la régulation du foncier et des prix de l’immobilier, pour la création d’outils afin que les collectivités puissent lutter contre l’accaparement des biens immobiliers et permettre aux jeunes générations de rester dans leur territoire, pour l’application d’un taux de TVA à 5,5% sur les travaux de construction et de rénovation des logements sociaux, pour la revalorisation du forfait charges des APL de 15 € / mois alors que la flambée des prix de l’énergie fragilise particulièrement leurs ménages modestes, pour la prise en compte de l’objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN) dans la fiscalité locale pour accompagner les communes dans cette démarche sans entraver leur développement, etc.
J’ai personnellement éprouvé le parti pris idéologique du Gouvernement et de la majorité sénatoriale avec le rejet de plusieurs amendements déposés avec ma collègue Sénatrice de l’Aube Vanina PAOLI-GAGIN (ici, ici, ici et ici), Rapporteure de la mission d’information que j’ai présidée cette année sur le thème « Excellence de la recherche / innovation, pénurie de champions industriels : cherchez l’erreur française ». En déclinant sous la forme d’amendements au PLF 2023 plusieurs des recommandations de notre Rapport, nous cherchions à améliorer l’efficacité et l’équité de la dépense publique consacrée à l’innovation, en modernisant le crédit d’impôt recherche (CIR) et en promouvant l’innovation dans les PME qui ne sollicitent pas ce CIR.
Jeudi 24 novembre, avec la complicité des Sénateurs du groupe Les Républicains, la 1ère partie du PLF 2023 a toutefois été adoptée. Je le regrette profondément. Avec ce Gouvernement, le bandeau qui recouvre les yeux de Thémis, déesse de la Justice, n’est plus le gage de l’impartialité, mais celui de l’aveuglement. Cette cécité, source d’iniquité, annonce des lendemains qui déchantent…